« ..Tu as vu un mort ? » Ses mots lui tirent un sourire en coin, l'équivalent d'un éclat de joie sur le visage de Sigyn. D'un rayon de soleil dans sa variété d'expression monochrome. Elle sirote son verre, puis laisse sa tête se déposer au mur froid. « Pas depuis ce matin, dans le miroir de ma salle de bain. » Ses mots lui échappe, la laissant sourcils froncé. Hésitante sur ce dernier point. « Enfin, je crois… » L'homme dont elle s'est abreuvé est, peut-être, devenue un mort après tout. Qui est-elle pour le savoir? Seulement la femme qui l'a abandonné après l'avoir goûté? Retournant dans son mutisme, elle hausse des épaules, aussi détendu que lui permet sa vie.

La nudité vient chatouiller ses oreilles, pendant qu'elle se demande quel est le plaisir à finir sans ses vêtements. Des culs, elle en a vu plus qu'il ne lui en faut à travers le temps et à ses yeux, la plupart se ressemble trop pour qu'elle y voie une différence. Si elle essaye, elle arrive vaguement à différencier ses souvenirs de sexe… Presque du moins. Un instant, elle se demande si elle a déjà croqué quelqu'un ici présent. Incertaine, elle préfère prendre les dernières gorgées de son verre et déposer celui-ci. La question semblerait sûrement insultante et techniquement, ils étaient ses alliés. Autant ne vexer personne sous prétexte que sa mémoire est défaillante. De nouveau, son regard coule vers Niilo, la seule constante depuis cinquante de Culte, qu’elle n’a pas complètement perdu dans la mer de son existence.

« C'est un jeu ma mie. » Mamie? Une minute son regard se fait froid. Qui la traite de mamie? Ses doigts se serrent sur une lame qui traîne sur son corps, avant de se détendre. Non… Ma mie… Son propre cerveau la détrompe en riant de son ouïe. « Rien de bien méchant, nous allons vous montrer. » En toute réponse, elle se contente de hausser un sourcil et d'attendre. La politesse de l'homme lui rappelle celle d'une autre époque, quand les manières et les froufrous étaient à la mode. Sigyn ne manque pas une seconde des mouvements du compte. Incapable de ne pas réagir quand quelqu'un envahit son espace personnel. Se répétant en boucle de ne pas attaquer, elle se raidie et attend patiemment. Malgré elle, vaguement curieuse de ce jeu sorti de nulle part.

« C'est le moment où vous lui donnez un ordre. » Ordre? Ce mot attire son attention. Elle aime bien donner les ordres, quand il n'y a pas de responsabilité qui montre le bout de son nez par la même occasion. Observant l'indigne qui se tortille presque sur place, Sigyn réfléchit. « Elle est à vous, c'est le jeu. » Sans même le regarder, elle repousse légèrement de la main l'homme qui s'est approché. Réclamant l'espace nécessaire à son bien-être. La morte se lève doucement, loin de l'ivresse et s'approche de sa proie. Qui n'en est pas une, l'observant de bas en haut. Non, définitivement aucun intérêt à voir plus de peau que nécessaire. Faisant apparaître sa fine lame, lui servant à l'heure des repas, elle marque sa peau de son tranchant et observer son sang impure de charogne qui rougie, noircie sa peau blanche d'un manque de soleil. Le visage sérieux, sans un rictus d'amusement, elle tend la main vers l'indigne. « Goûte. »

C'est le sexe qui se met à embaumer l'atmosphère, avant même que la rouquine s'éloigne, emmenant la seule menace de son existence au loin. Avant même qu'un homme, ou un chiot, lui court après. Sigyn retourne s'asseoir, laissant sa plaie guérir sans aide, ni soin. Demain, il n'y verra plus. Un peu de sang prélevé et le tour sera joué. Le sexe s'accentue et attire, une fraction de seconde, son attention. Avant de la perdre de nouveau. Danse charnelle et échange de salive, rien de plus ancien à l'univers. Ses propres pensées la ramène à des fragments d'orgie qui ont peuplé une époque de sa vie, des souvenirs qui vont et viennent sans substance sous son crâne. Aujourd'hui l'envie est moindre et l'intérêt difficile à éveiller. Sa passion n'en est pas moins inflammable, lorsque les conditions s'alignent pour l'éveiller. Silencieuse et témoin, comme très souvent, elle laisse ses yeux suivre Claus qui s'éloigne. Peut-être est-ce pour le mieux? Peut-être devrait-elle suivre et s'éloigner des jeunots. Indécise, elle s'ennuie et s'immobilise. Comme seul un mort sait le faire. Seule sa lame bouge entre ses doigts, agile de toutes ses années de pratique. Attendant de prendre sa décision.