Au bout du couloir, la porte se referma sur le professeur Chermovna qui rentrait chez elle, sanglée dans un imperméable, le sac sur l’épaule. Lena lui adressa un petit sourire pour lui dire au revoir et se concentra sur le reste de ses photocopies. De tout le personnel de recherche, ou même de jour tout court, Léna devait être la seule encore au zoo. Et c’était fait exprès. Pour ce qu’elle tramait, la rousse n’avait pas besoin qu’un petit curieux vienne fourrer son nez dans ses affaires car si elle utilisait les ressources de l’établissement, ce n’était pas pour ses recherches professionnelles. Si elle n’avait aucune accréditation, rien n’aurait pourtant pu l’arrêter. Pas après la mort du Tsar et ce qui c’était passé sur cette fichue place. Rien que d’y repenser, elle en frissonnait encore. Le monde avait besoin d’en savoir plus sur ces créatures qui apparaissaient à travers leur pays, comment et pourquoi cela arrivait, ce que cela impliquait pour ceux qui devenaient les hôtes volontaires ou non et surtout s’il était possible pour l’Homme d’y réagir. Lena voyait le potentiel de ses recherches, leur importance, mais elle avait peur qu’on lui oppose ce qu’elle aurait opposé à n’importe qui dans sa situation : d’être trop impliquée.

Peu importe pour l’instant. Tant que personne ne se mêlait de ses affaires, elle pouvait étudier comme elle souhaitait, d’autant qu’elle avait des alliés plus ou moins contraints. Si Yuliya ne se laissait convaincre que par une contrepartie quelle qu’elle soit, d’autre comme Miromir faisait preuve d’un enthousiasme qui trouvait sa résonnance chez Léna. D’ailleurs, mieux valait ne pas trop le laisser tout seul trop longtemps. La photocopieuse lui rendit ses documents et elle remonta le couloir dans un pas soutenu pour regagner la chaleur de son bureau où l’attendait le jeune homme. Sait-on jamais qu’il aurait été tenté de croquer à nouveau un des résidents du zoo. Posant son tas de papiers sur son bureau, la rousse décrocha sa plus belle tasse réservée aux invités, la cafetière et servit une bonne rasade à Miromir avant de revenir s’installer à son bureau en déposant sa tasse devant lui.

« D’accord, donc… comme je te disais : les résultats des analyses. »

Reprit-elle comme si elle n’avait jamais quitté le bureau en tendant à son interlocuteur la liasse toute chaude issue du copieur. En face d’elle, Léna avait les mêmes, couverts de données brutes que personne sans formation scientifique et une vague connaissance du sujet n’aurait pu intervenir. La rousse trouvait juste plus poli de partager les informations avec lui pour lui assurer de son importance au sein du projet.

« Je les ai reçu ce matin, c’est pour ça que je t’ai envoyé un message. »

La dernière fois qu’il était venu, elle avait utilisé une faveur qu’un laborantin lui devait pour faire évaluer le champ visuel du jeune homme. La particularité de sa vision en bichromie l’intriguait plus qu’autre chose. Son regard remonta vers Miromir et elle tiqua. Mince. Où étaient passées ses bonnes manières ?

« Euh, avant… Tu veux du sucre, du lait ? »