Début de soirée et fin de service pour les Douceurs de Moscou . La pâtisserie se vide, les derniers clients du salon de thé quittent peu à peu les tables. A cette heure-ci, peu sont ceux qui viennent boire un thé ou un café avec une pâtisserie, mais certains le font tout de même. Des rendez-vous tardifs, se rafraîchir ou se réchauffer avec une boisson, attendre l'ouverture des premiers restaurants.. Par contre, il n'est pas rare de voir des clients pour la pâtisserie seule. Prendre un dessert à apporter chez l'hôte qui vous invite à dîner, pour le lendemain matin ou autre..  Cependant le nombre de clients est toujours diminué à cette heure, souvent Yeva ne garde qu'un employé pour la fermeture.

Elle n'est pas toujours présente, ses pâtisseries se gèrent seules et elle engage des personnes en qui elle a confiance. Elle gère quelles pâtisserie sont vendus, la carte proposée et le personnel. Parfois aidé d'un manager. En ce moment, elle prépare également les plans de la troisième boutique de sa licence, qui devrait être plus grande. Mais elle hésite encore où l'installer.. Cependant ce soir, elle est là. Elle a voulu venir cuisiner pour tester quelques recettes. La fin d'après-midi étant plus calme, elle avait choisi ce temps pour utiliser la cuisine. Maintenant que le ciel s'assombrit et se colore par le soleil couchant, Yeva lave ses mains. La journée a été productive, c'est assez satisfaisant. Elle ajoutera deux des recettes testées ce soir.

Maintenant, qu'allait-elle faire de sa soirée .. ? Voulait-elle retrouver ce surnaturel, faisant frémir son corps et son âme ? Elle avait beau jouer les réticentes, c'est toujours elle qui revenait vers lui, qui l'utilisait pour assouvir cette attirance.. peu commune. Elle souhaitait garder ce semblant de contrôle. Mais ce soir, elle n'était pas sûre d'en avoir envie.. Elle entendit la sonnette d'entrée retentir puis un homme commander. Se privant de la politesse la plus basique : bonjour, s'il vous plaît, merci.. Elle soupira, les gens ne se rendent parfois pas compte de la rudesse et de l'inconvenance dont il font parfois preuve. De plus, en passant par l'entrée joignant la cuisine au comptoir, elle peut voir que l'homme en question a gardé ces lunettes de soleil. Bon.. Il y a parfois des raisons médicales qui peuvent justifier de les garder en intérieur, mais avec l'indélicatesse dont l'individu a pu faire preuve, elle reste méfiante.

Elle regarde l'heure, la fermeture approche à grands pas. Elle décide d'aller voir son employée, en train de se charger de la commande de monsieur .

« - Je vais m'en occuper, allez préparer la fermeture je vous prie. Merci »

La jeune fille acquiesce, se dirigeant vers le salon pour débarrasser les derniers couverts restant sur les tables. Cependant que Yeva finit de préparer la jolie boîte de pâtisserie pour le client. Elle noue un ruban tout autour et ajuste la petite carte de la maison avant de la poser sur le comptoir, tapotant sur la caisse le prix. Avant de l'annoncer, redressant la tête vers l'homme.

« - S'il-vous-plaît monsieur. »

Cela lui permet de le détailler un peu plus. Enfin ce qu'elle peut, son visage a quelque chose d’intrigant. De part ses lunettes qui le masque un peu, mais elle devine des traits un peu dures avec un certain charme. Il se dégage aussi de cet homme, une certaine aura. De part ses manières, sa posture, ses vêtements, intrinsèquement, elle ressent quelque chose d'attirant. C'est assez familier avec ce que font ressortir les hommes d'affaires, quelque chose qui inspire un certain respect rien que par leur tenue. Mais chez lui il y a un peu plus.

Il n'est pas rare que Yeva est ce genre d'analyse envers les gens. Son caractère retenu et discret l'a toujours placée en observatrice. Cela lui permet d'avoir un certain recul et une appréhension sur son entourage. Pour comprendre à quelles personnes elle a à faire, comment agir en conséquence. Prenant évidemment garde à ne pas se montrer trop importune avec cette attitude, restant discrète.

Fidèle à lui-même, l'homme ne se montre pas plus courtois quand il lui tend sa carte bleue. Ce qui arrache un léger soupir à Yeva qui prépare le terminal de paiement, tapotant le prix, alors qu'elle se sent à son tour épiée. Il a peut-être remarqué ses observations et les lui rend poliment.. Pour une fois qu'il fait preuve de politesse. Tant pis, elle ne se sent pas coupable de son attitude, vu la sienne. Elle glisse la carte de paiement dans la machine alors que celui-ci daigne enfin parler, elle entend même un sourire dans sa voix,

"- Je vous intéresse ? Je vous vois me jeter des regards depuis tout à l'heure." 

Son inconvenance la fait sourire un instant, pas vraiment amusée.. Plutôt étonnée de sa capacité à se montrer autant grossier. Elle redresse la tête pour lui tendre le terminal,

« - Non, je me demande simplement comment l'on.. »

Elle se stoppe, l'homme a enfin enlevé ses lunettes, plongeant ses yeux de glace dans les siens. Et soudain elle se sent comme figée, pétrifiée. Elle comprend pourquoi il les garde, ce n'est pas sa goujaterie.. Ce doit être un surnaturel, elle n'est pas sûre de quelle espèce, mais dont le regard est sans doute doté de quelque pouvoir... À cet instant, Yeva reconnaît bien ce que ressent son corps. Son souffle s'accélère, elle peut sentir son cœur accélérer dans sa poitrine et elle est dans l'incapacité de détourner son regard de celui qui est la cause de tout cela. Elle a l'impression qu'il pourrait la tuer du regard et c'était sans doute le cas.. Elle se sait en danger et pour survivre, son corps d'humaine provoque une émotion bien particulière à son cœur. 

Cette émotion, elle sait plus que quiconque ce que c'est.. C'est la peur. La peur qu'elle apprécie tant, elle ne la rejette pas, ne cherche pas à la fuir.. Elle l'accepte, la reçoit au contraire.. À défaut de la provoquer, mais elle n'en est que plus exquise. Elle en profite pour regarder plus attentivement l'homme en face d'elle. Il a des traits fins, mais dure. Ses yeux et son regard ont quelque chose de terrifiant. Elle reconnaît un prédateur, comme ceux qu'elle a l'habitude de provoquer.. Enfin, un seul en vérité.

Son souffle rapide peut trahir sa peur, mais aussi une certaine, excitation. Un frisson pour ce sentiment qui la passionne. Un long souffle fébrile s'échappe de ses lèvres. Elle ne peut pas lutter, elle aime trop ces sensations.. Mais elle finit par être interrompue, son employée s'approchant d'elle,

« - Mademoiselle, j'ai fini de ranger. Je vais y aller. 
- Oh.. Bien, merci. Au revoir »

Sortie de son hypnose, elle tourne la tête vers son employée, se remettant de ses émotions. Celle-ci va retirer son uniforme dans l'arrière-boutique, la laissant avec l'homme. Elle hésite un moment avant de revenir à nouveau vers lui. A-t'il pu remarquer ce que son regard à provoqué chez elle, profondément ? En a-t-il conscience .. ? Peu importe, elle décide de reprendre comme si de rien n'était, se redressant,

« - Non, je me demande simplement comment l'on peut se montrer aussi impoli en si peu de temps.. »

Cependant elle est moins concentrée sur sa remarque, son esprit est ailleurs, encore dans les limbes de la peur ..

Elle s'étoufferait presque tant il se montre grossier, mais elle se contente d'ouvrir un peu plus les yeux avant de les fermer, subjuguée. Elle soupira, ses paroles l'ont au moins permis de sortir de cet état hébété.. Pour Yeva, avec l'éducation de prestige qu'elle reçoit depuis toujours, les bonnes manières qui font partie intégrante de son attitude, les protocoles qu'elle a acquis.. Une telle aisance dans la déplaisance ne peut que la faire tiquer.

Mais en plus, il se permet de se montrer irrespectueux avec son rang. Acquis et défendu par sa famille depuis toujours.. Elle en oublie tout ce qui vient de se passer, ne cherchant même pas à retrouver cette sensation. Elle se montre ferme, forte… Tout ce qui ressort quand l'honneur de sa famille est bafoué,

« - Je vais vous demander de sortir maintenant. »

Il est déplaisant, vulgaire, goujat.. Notamment envers elle en tant que femme... Ça non-plus, elle ne le tolère pas. Ses ongles tapotèrent sur le comptoir,

« - Où j'appelle la police.. Pour avoir utilisé vos pouvoirs surnaturels peu bienveillant, quelque soit votre espèce.. »