« Vous voulez un autre café ? Vous semblez avoir enfin terminé le vôtre. »
« Oui, merci. »
Vasily laissa la serveuse le resservir, avant de la congédier d'un petit geste tranquille. Il reprit sa cigarette, tira dessus, avant de laisser la fumée ressortir par ses narines. Assis à côté d'une table deux places, sur la terrasse du café appelé Le Joyeux Chiot – un nom qui sonnait français, et dont la logique échappait totalement au tueur – il attendait. Il patientait, même. Autour de lui, les autres clients discutaient, buvaient, mangeaient, et vivaient leurs vies respectives. Pour lui, rien de tout ça n'avait d'importance.
Car lui, il était là pour toute autre chose.
Il attendait quelqu'un. Il consulta sa montre, retroussant légèrement la manche de son poignet gauche pour cela. En retard, évidemment. Il fronça légèrement les sourcils, sachant que de toute façon il n'avait pas espéré obtenir ce tête-à-tête à l'heure prévue. Bellavance avait un emploi du temps plutôt chargé, un métier chargé, et forcément, il pouvait y avoir de nombreux contre-temps. Et quand ils se voyaient, habituellement, c'était rapidement et discrètement. De brèves entrevues. Plus brèves que ce qui les réunissait aujourd'hui, en ce début de soirée.
Il prit une gorgée de son café, tâchant de la trouver dans les passants. Il analysait, par réflexe, les comportements de tous. Habitué à vivre plus ou moins dangereusement, en fonction de ses activités et des jours, il se sentait souvent pousser des accès paranoïaques. Et attendre, comme ça, dans la fraîcheur d'un soir d'août, ça avait de quoi susciter lesdits accès. Bon sang, ce qu'il détestait attendre comme ça sans rien faire d'autre que fumer et boire un café !
Enfin, il la vit ; la jeune femme avançait parmi les passants, les mains dans les poches, et allait vers lui. Elle avait du le reconnaître facilement ; comme d'habitude, il avait une tenue pour le moins excentrique qui le distinguait rapidement du commun des mortels. Vasily avait l'habitude, et affectionnait particulièrement, de porter un trench coat sombre, muni d'une capuche. Quand il « travaillait », il abaissait ladite capuche de sorte à ce que seule sa barbe soit visible. Là, le visage découvert laissait voir ses poils brun-roux, et son visage fermé.
« Vous êtes en retard. » commenta-t-il simplement.
Il tira de nouveau sur sa cigarette, alors que la jeune femme s'asseyait.
« Je ne vous ai pas commandée de café, je ne savais jamais ce que vous buvez. Mais allez-y, commandez. J'offre. »
Il fit un geste impérieux à la serveuse, pour attirer son attention. Son regard gris se fixa sur la flic en face de lui, le visage toujours fermé, dans l'attente de sa réaction.
Mar 20 Aoû - 23:14
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Je suis en retard pour mon rendez-vous avec Vasily, pour ne pas changer. J'attrape mon sac à main dans mon casier, puis ma paire de chaussure de ville que j'enfile à la place de mes chaussures plates de travail. Je range rapidement mon badge de sécurité dans mon sac, puis je claque la porte du casier en quittant le commissariat.
Je marche à grandes enjambées dans les rues du quartier commun, à la cherche d'un café chic nommé "Le Joyeux Chiot". En tant que Française de naissance, je ne comprends pas du tout comment quelqu'un a pu nommer son café comme ça, c'est stupide et aberrant. Je remercie au moins le propriétaire de ne pas avoir fait de faute d’orthographe dans le nom, c'est déjà pas mal.
Je slalome entre les gens pressés, mais je suis plus pressée qu'eux, alors je donne quelques coups d'épaule. Pour l'occasion je porte une tenue un peu plus classe que d'ordinaire. Un top blanc façon blouse sans manche rentrée dans ma jupe crayon noir qui descend jusqu'à mi-cuisses. Ajouté à ça, une paire d'escarpins très ouverts à talons épais noirs et dorés, et une paire de lunettes de soleil. Il fait presque nuit, mais ça m'est égal. Je porte également par-dessus un un trench coat court, afin d'avoir des poches plus pratiques que celles de mon sac.
Je reconnais mon rendez-vous de loin, assit sur la terrasse dehors, avec pour seule compagnie un café et une cigarette. Que c'est triste. Je bouscule les passants sans m'excuser, avançant d'un pas très fluide vers lui, j'ai un peu l'air d'une diva, c'est vrai. Je suis un peu émoustillée, ces derniers temps je n'ai pas eu l'occasion de sortir boire un café avec un homme. Depuis quand je ne me suis pas envoyé en l'air ? Difficile à dire. Peut-être que Vasily pourrait enfin se rendre utile.
J'arrive devant lui, et tandis que je tire la chaise pour m'asseoir, il ne trouve rien de mieux à dire que de relever le fait que je suis en retard. Je hausse les sourcils d'un air ennuyé, puis je m’assoie face à lui en accrochant mon sac à ma chaise. Le bistrot n'égal pas un seul instant ceux de France, tant pis. Vasily capte l'attention de la serveuse pour que je puisse commander, à ses frais. Ce qui me fait sourire.
- "Une limonade avec une gauffre chantilly et une boule de glace." dis-je à la serveuse.
Vasily m'observe en silence, son visage est fermé, comme d'habitude. J'ai toujours eu du mal à savoir ce qu'il pense. Je retire mes gants blancs pour les poser sur la table, maintenant que le risque de toucher accidentellement quelqu'un est écarté.
- "Alors dis-moi, comment ce passe ton travail ?" dis-je à Vasily pour faire un peu la conversation.
Elle le tutoie, une habitude prise il y a peu alors que lui se contentait de préserver un minimum de respect et de distance via le vouvoiement. Il n'apprécie guère cette familiarité dont elle fait preuve à son égard ; mais il laisse couler, comme à chaque fois, car ça ne sert de toute façon à rien de lui rétorquer quoi que ce soit. Cette femme est bornée, et il n'avait pas la moindre envie de se débattre avec elle des règles de civilité. Surtout quand il avait lui-même des moments où il se montrait impoli.
Non pas qu'il en ait quelque chose à foutre.
Mais il préférait ne pas envenimer la conversation avec des détails ennuyants.
« Vous êtes sûre de vouloir connaître les détails ? De ce que je me souviens, vous n'aviez pas forcément envie de savoir ce que je faisais. »
Vu son métier, ils avaient estimé préférable de s'en tenir aux détails importants plutôt qu'aux grandes conversations tournant autour des tâches parfois sordides de leurs activités. Mais la curiosité semblait parfois ressurgir, chez la blonde, ce qui avait parfois le don d'agacer légèrement le tueur. A voir l'expression du visage de sa vis-à-vis, Vasily avait touché un point sensible, et il s'autorisa un petit sourire satisfait.
« Bien ce qu'il me semblait. Vous n'avez pas envie de savoir pourquoi j'ai brisé les mains et les pieds d'un enfant de douze ans. »
La serveuse revint sur ces faits, lançant un regard acerbe à Cybèle. Pathétiquement, elle s'efforça, tout en déposant la commande demandée, de montrer au maximum son corps pour attirer l'attention de l'homme. Ce dernier n'en avait que faire. Il ne cherchait pas à se réchauffer le soir, à s'aventurer dans une relation, et encore moins à trouver une partenaire pour passer le temps. Il était beaucoup trop professionnel pour ça, même si les formes qu'il devinait derrière la tenue de serveuse étaient plutôt engageantes.
Il prit une longue gorgée de son café, avant de reprendre la parole :
« Alors, Bellavance. Que puis-je faire pour vous ? On avait convenu d'une rencontre ici, ce soir, mais vous avez été assez vague sur vos raisons. Ne me dîtes pas que vous avez enfin franchi le cap et accepté que je vous vienne en aide pour quelque chose ? Si vous êtes là pour être payée, sachez que je n'ai encore aucun cadavre à vous faire examiner. »
Mer 21 Aoû - 10:51
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Maintenant que je suis assise, je peux souffler un peu. Ce n'est pas toujours facile de presser le pas avec des talons hauts, mais bon. Je passe ma commande histoire de prendre des forces pour la soirée, je suis fatiguée de ma journée, j'ai besoin d'un bon remontant. Rien de mieux que le sucre, en boisson ou en nourriture, pour donner un bon coup de fouet. J'amorce distraitement la conversation avec Vasily, histoire de faire vaguement la causette avant de rentrer dans le vif du sujet. Mais il me demande si je suis bien sûre de vouloir connaître les détails. Je fronce les sourcils à l'idée d'obtenir les détails, ce n'est pas ce que j'ai demandé.
J'observe son petit sourire satisfait tandis qu'il m'offre une petite anecdote sur les mains et les pieds brisés d'un enfant de douze ans. Je le fixe longuement en essayant de démêler le vrai du faux. Oserait-il vraiment lâcher ce genre en vérité en plein milieu d'un café ? Je préfère croire que non, il le fait exprès pour m'emmerder. Je soupire de lassitude, ennuyé de son comportement.
La serveuse revient juste après ce largage de bombe, m'offrant un regard acerbe dont je peine à comprendre l'origine. Je lui offre un regard dédaigneux, je suis de la noblesse moi madame. Je laisse l'employé déposer ma commande tandis que j'observe son comportement de chaudasse. Lorsqu'elle termine enfin son petit jeu et qu'elle s'en va, je peux enfin continuer la discussion avec Vasily.
Je prends une gorgée de limonade en l'écoutant parler, puis je repose le verre pour m'asseoir plus confortablement. J'entame le mouvement de croiser mes jambes lorsque l'une d'elle caresse de trop près celles de Vasily. Qu'il n'aille pas croire que je lui fais du pied, quoi que, ça m'est égal. Je fronce les sourcils lorsqu'il évoque un ''franchissement de cap''. Je n'ai besoin de tuer personne, qu'il s'en assure.
- "Je n'examine pas les cadavres, ce n'est pas mon boulot. Deuxièmement, tu t'es lâché sur ton dernier contrat, t'abuse. J'ai dû faire des heures supp' non payées à cause de nombre de pièces à conviction à examiner. Heureusement pour toi, il n'y en avait que deux qui t'incriminaient. Sois plus délicat la prochaine fois." dis-je très sérieusement.
J'attrape la cuillère pour prendre une morceau de glace au chocolat, dont je savoure le goût.
Il tira une dernière bouffée sur sa cigarette, avant de l'écraser dans le cendrier.
« Plus délicat ? Comment aurais-je pu être plus délicat ? Un homme de trente-neuf ans tabasse sa femme tous les soirs, ramène une pute au moins une fois par semaine pour l'obliger à faire un plan à trois. Il ne veut pas d'enfant, prenant au moins ses précautions pour ça. Mais par contre, ça ne le gêne pas de scarifier ses partenaires pour leur montrer qu'il avait envie de leur laisser un souvenir. Et je devrais être plus délicat ? Désolé, très chère, mais lui découper la bite en morceaux, c'était le plus délicat que je pouvais faire. »
Avec un plaisir manifeste, Vasily décèle une expression de dégoût et d'horreur dans le regard de Cybèle, alors qu'elle déguste simplement sa glace. Il se fiche pas mal de ce qu'elle peut penser ; qu'il soit un barbare, un psychopathe, ou simplement un enfoiré de plus. Il fait ça parce que ces gens le méritent. Il ne punit pas ceux qui ont une bonne raison d'agir, sinon il se serait suicidé depuis longtemps.
Il lève légèrement une main, toutefois, pour calmer la tension qui monte.
« Mais ne parlons plus de ça. Ce sont des détails sordides qui n'intéressent personne. Et surtout pas les oreilles indiscrètes qui peuvent traîner. Même si, pour être tout à fait honnête, je m'en cogne. »
Sur ces belles paroles, la serveuse revint. Elle avait certainement du noter le mouvement de jambes de la flic, et pour une raison tout à fait puérile et idiote, se faisait donc un devoir de venir montrer ses arguments à Vasily. Ce dernier la laissa s'approcher, le temps de chercher quelque chose dans son trench coat.
« Un autre café, monsieur ? »
Il acquiesça en silence, se contentant d'écarter assez un pan de son manteau pour montrer la crosse du revolver qu'il portait. Il sortit un paquet de cigarettes, en prit une, puis la porta à ses lèvres. Il attendit que la donzelle se casse pour l'allumer, avant de relâcher la fumée d'un air exaspéré.
« Je ne sais pas que ce vous lui avez fait, mais depuis que vous êtes arrivée, elle n'arrête pas de me faire du pied. Quelle idiote ! »
Il prit une gorgée de son café.
« Plus sérieusement, merci pour le coup de main. Je n'étais pas totalement certain de n'avoir laissé aucune trace. La police a-t-elle réussi à me trouver un surnom, au fait ? Je suis curieux de ce genre de choses. »
Mer 21 Aoû - 13:24
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Je demande à Vasily de se montrer plus délicat dans ses meurtres, histoire de me faire moins de travail inutile. Je ne suis pas contre quelques affaires supplémentaires, mais devoir analyser plusieurs dizaines de pièces à conviction, c'est très long, et très chiant. Vasily semble s'offusquer de ma demande, sa cigarette en main qu'il vient écraser dans le cendrier.
Comme je le redoute, Vasily s'emporte un peu contre ma formulation. Il se justifie en étalant l'histoire de sa malveillante victime et la façon dont il lui a découpé la bite en morceaux. Je roule des yeux à cette image dérangeante alors que je mange ma gaufre. Le russe face à moi semble ressentir un certain plaisir à voir mon expression de dégoût. Je soupire en découpant ma gaufre avec la cuillère, puis je prends une gorgée de limonade bien fraîche. Vasily finit par couper de lui-même le sujet, mais certainement pas par égard pour les oreilles indiscrètes. Se rend-il au moins compte qu'il pourrait m'entraîner dans sa chute s'il venait à être découvert ?
La serveuse revient vers nous à la demande de Vasily, et comme la chaudasse qu'elle semble être, elle se fait encore une fois le devoir de montrer ses courbes à Vasily. J'observe la femme dans son petit short moulant et sa chemise ouverte, je trouve cette tenue très peu professionnelle. Il lui commande un autre café, puis il s'allume une nouvelle cigarette. Il ne vivra pas longtemps à cette allure, il fume trop et il boit trop de café. Toutefois, il ne semble pas encore aveugle puisqu'il a remarqué le petit manège étrange de la serveuse. Je souris d'un air rieur avant de répondre.
- "Il devient clair qu'elle te fait du rentre-dedans, elle aimerait sans doute plus qu'un gros pourboire. Vu le regard qu'elle m'a lancé, elle est jalouse et elle a bien raison. Pas besoin de se poser la question, je suis bien mieux qu'elle, et elle s'en rend compte." dis-je en observant tour à tour la serveuse et Vasily.
Il est clair que la plèbe qu'elle représente ne pourra jamais surpasser l'élégance naturelle des nobles Français. Il n'y a pas photo entre son mini-short en jean et ma jupe crayon de working girl. Pas besoin de montrer sa peau pour être sexy. J'observe Vasily d'un regard sévère lui intimant silencieusement d'appuyer mes propos. S'il s'avisait de dire le contraire, je pourrais me vexer.
La discussion reprend, et Vasily me remercie pour le coup de main non-gratuit que je lui ai fourni. Il me demande également si la police lui a déjà trouvé un surnom de criminel. Je hausse un sourcil en pinçant un morceau de gaufre entre mes doigts.
- "Humm... Je crois qu'ils sont en train d'y réfléchir. En tout cas, il est clair qu'ils te jugent comme un dangereux sociopathe qui se prend pour un justicier." dis-je en portant le morceau à mes lèvres.
« Bien plus mature, c'est certain. Bien mieux, je ne saurais dire. Sans vouloir vous vexer, Bellavance, c'est une question de goût que vous me posez là, et tous les hommes n'ont pas les mêmes. Pour ma part, je préfère simplement éviter le risque d'un procès et d'un enfant non-désiré avec une gamine un peu trop chaude, en tout cas pour ce qui concerne la serveuse. »
Il préféra ne rien ajouter concernant son surnom criminel en devenir. Après tout, il avait beau être curieux de tout ça, il ne tenait pas vraiment à se retrouver affublé de quelque chose d'aussi ridicule qu'un nom pompeux pour faire les gros titres des journaux. Toutefois...
« Un dangereux sociopathe... ha ! Si seulement ils savaient. »
Il but une longue gorgée de son café, laissant le liquide lui brûler la gorge agréablement. Vasily appréciait beaucoup cette boisson forte, surtout pure, sans sucre. Trop nombreuses étaient les personnes qui prenaient le leur avec quelque chose pour l'alléger. Quelle hérésie ! Dieu seul savait à quel point cela pouvait l'agacer.
Mais Dieu n'avait rien à voir, pour le moment, avec tout ça.
« Un sociopathe, comme vous le dîtes, ne se préoccuperait pas vraiment de venir prendre un café avec une trentenaire, maman d'une petite fille. Il agirait dans l'ombre, en observation. Il ne prendrait certainement pas le risque de balancer ses quatre vérités sur la terrasse d'un café. Il ne viendrait même pas ici. Un sociopathe ferait ses victimes avec un schéma en tête. Personnellement, je peux raisonnablement affirmer que je ne fais pas de victimes inutiles ; et en plus de ça, je travaille contre de l'argent. Pas par plaisir malsain. »
Dire qu'il n'aimait pas ce qu'il faisait serait mentir, bien sur. Il aimait beaucoup mieux ce qu'il faisait maintenant que lorsqu'il était un flic, lui aussi, limité par la bureaucratie et les erreurs. Par la corruption et les lenteurs administratives. Il se demanda, l'espace d'un instant, comment réagirait Cybèle si elle apprenait qu'il avait été policier, lui aussi. Elle ne le croirait certainement pas, de toute façon.
Il se redressa un peu sur sa chaise.
« Nos points de vues divergent depuis le début, entre vous et moi. Mais comme dit à l'époque : on s'en fout. Vous faites votre boulot, je fais le mien, et tout le monde est content car on s'arrange mutuellement. Cela dit, je vais finir par croire que vous vouliez me proposer un rencard, car cette entrevue dure bien plus longtemps que les habituelles. »
Jeu 22 Aoû - 0:44
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J'explique à Vasily mon point de vue sur le comportement de la serveuse envers lui, expliquant à demi-mots qu'elle lui fait du rentre-dedans. Je n'avais pas vu ce type de comportement chez une serveuse, ou bien, simplement sont-elles d'ordinaire plus discrètes. Vasily commente ma réponse, selon lui je suis plus mature, c'est certain. Mais pas forcément bien mieux ? Je fronce les sourcils. Je note tout de même qu'il a utilisé le terme "mature" qu'on utilise souvent pour qualifier les femmes qui ne sont plus toutes jeunes.
Le sujet du surnom criminel est bien vite mis de côté, Vasily ne répond rien. Cependant, il tique au terme de sociopathe. J'ai bien l'impression que ce terme est un peu trop doux pour lui. Je déguste ma gaufre encore chaude, la boule de glace étant déjà un lointain souvenir. J'en suis déjà à lui moitié, et je suis loin d'être calée. Cette collation est trop légère à mon goût, j'ai bien envie de demander un supplément de gaufre. Toutefois, je n'ai pas le temps de me poser la question bien longtemps, puisque Vasily renchérit sur le sujet du sociopathe. Est-il vexé du terme utilisé ? Peut-être bien, j'ai l'impression qu'il se justifie un peu. De toute façon, qu'il soit un sociopathe ou non, ça m'est égal. Sa façon de se foutre de beaucoup de choses très importantes le rend bizarre. Je le regarde d'un air désabusé, néanmoins il souligne un point important. Il est mercenaire, s'il tue, c'est qu'il a des contrats. Il y a donc des gens au moins autant coupables que lui.
Il se redresse sur sa chaise tandis que j'entame la seconde moitié de ma gaufre. Vasily continue de parler, soulignant nos points de vue divergeant. Mais également le fait que cette entre-vues dure bien plus longtemps que d'ordinaire. Je relève le regard vers lui, réfléchissant à une réponse adaptée.
- "Tu me crées une dose de travail supplémentaire inimaginable, tellement que je n'ai plus le temps de sortir le soir. Me proposer un dédommagement de ce type serait la moindre des choses." dis-je en haussant un sourcil.
Mon regard se plante dans le siens tandis que l'une de mes jambes s'avance vers les siennes, pour venir les frôler.
Vasily laisse son regard fixer celui de la flic, bien conscient que sa phrase accompagnée de son nouveau mouvement de jambes n'a rien de fortuit. Il laissa la fumée de cigarette s'évanouir devant son visage, réfléchissant à ce qu'il allait lui répondre. La trentenaire avait visiblement une idée derrière la tête, une idée assez basse d'instinct et qui ne nécessitait même pas des sentiments. Beaucoup en auraient profité, simplement pour satisfaire un désir lubrique déclenché par une femme entrepreneuse ; ce qui était plus rare qu'on pouvait le penser. C'était donc d'autant plus émoustillant pour un homme.
Mais il y avait un détail qui clochait dans tout ça : Vasily n'en avait pas vraiment envie.
Cybèle n'était pas moche, ni mal formée. Dire le contraire aurait été mentir ; la femme était bien conservée, encore jeune, et assez intelligente pour qu'elle soit bien consciente de ce dont il s'agissait en réalité. Un simple échange sexuel. Dans d'autres circonstances possibles, il n'aurait pas vraiment rechigné à sauter sur l'occasion... ou sur la dame, pour parler de manière triviale. Mais pas ce soir.
Il l'observa encore un moment, avant de répondre. Sa voix n'avait rien de méchante, heureusement :
« Laissez votre jambe là où elle est. Je ne suis pas d'humeur pour ça. »
Il avait tâché d'être aussi doux que possible dans sa réponse, car il ne tenait pas à vexer inutilement la blonde. Pas parce qu'il tenait spécialement à elle ou à son bien-être, non, il ne fallait pas pousser. Mais bien parce qu'il n'avait pas envie qu'elle soit opposée à l'idée de l'aider à l'avenir, pour une simple question de cul.
« Peut-être un... »
« Je vais devoir vous demander de partir. »
La serveuse venait de faire irruption, au moment où Cybèle finissait son repas. Elle avait l'air agacée ; sûrement pour la même raison qu'avant. Vasily soupira, posa sa cigarette, et lança un regard courroucé et froid vers la gamine. Celle-ci recula légèrement.
« Je ne crois pas. La dame ici présente vient à peine de terminer sa première partie de repas ; et qui plus est, je sais que vous avez aussi une carte de restauration ici. Vous allez donc être assez aimable pour nous les apporter, plutôt que de sauter sur l'occasion de forcer une cliente de partir. Oh, et soyez une brave jeune fille, pendant que vous y êtes : cessez de me faire chier en bougeant vos seins pour que je les vois. Ils sont beaux, ils sont gros, mais je ne suis pas intéressé. Allez retrouver votre cuisine, maintenant. »
Il attendit qu'elle s'éloigne pour reprendre la parole, à l'intention de Cybèle :
« Allez, j'offre également le repas. En dédommagement. »
Jeu 22 Aoû - 11:43
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Nos regards sont accrochés l'un à l'autre, moi pour essayer d'attirer Vasily dans mon lit, et lui pour... réfléchir à la question ? J'offre une caresse avec ma jambe, de quoi être explicite. Il ne réagit pas vraiment, ou plutôt, il réfléchit soigneusement à sa réponse. Il faut dire que Vasily est encore frais pour son âge, il est surement encore capable d'avoir de solides érections. Quitte à faire des heures supp' à cause de lui, il pourrait au moins me rendre service non ?
Quelque chose dans son attitude m'indique déjà sa réponse, il ne semble pas très intéressé par mes flatteries. Il finit par me répondre d'une voix sans méchanceté, me demandant d'arrêter mon petit jeu de jambes. Je soupire pour prendre une moue boudeuse, je suis plutôt déçue de sa réponse. Je recule mes jambes des siennes pour les replier sous ma chaise tandis que je reporte mon regard sur ma gaufre entamée.
Alors que Vasily va ajouter quelque chose à dire, la serveuse le coupe dans sa phrase pour nous demander de partir. Elle a brusquement fait irruption dans notre discussion avec sa mine agacée. Je n'ai pas terminé ma collation, et je fronce les sourcils à son comportement. Elle pourrait être un peu plus aimable non ? On vient de dépenser l'équivalent d'une quinzaine d'euros entre les cafés et mon désert. Je ne dis rien, laissant le loisir à Vasily de lui répondre en lui lançant un regard courroucé et glacial. J'enfourne une cuillère de gaufre en regardant le spectacle se déroulant devant moi. Je suis plutôt surprise de la fermeté de sa réponse et encore plus lorsqu'il la rembarre elle et ses gros seins. Autant dire que je sais maintenant à quoi m'attendre si j'ai le malheur de froisser le russe. Alors qu'elle s'éloigne, je ne manque pas d'ajouter discrètement ma petite touche à la discussion.
- "Connasse." dis-je dans mon français natal.
Après qu'elle se soit éloigné, Vasily reprit la parole plus calmement, déclarant qu'il offre le repas en dédommagement. Je hausse les épaules en retirant ma mine mi-boudeuse mi-surprise pour afficher un petit sourire.
- "Chouette ! J'ai pas mangé dans un bistrot depuis un moment." dis-je assez enthousiaste.
Je termine doucement mon verre de limonade pour m'attaquer plus sérieusement à la gaufre. Avant de regarder la carte des plats salés, je dois faire passer ce goût sucré. J'ai commencé par le désert. Mais bon, je vais pas m'en plaindre hein, c'est Vasily qui paie. De toute façon il gagne certainement mieux sa vie que moi.
- "Je me demandai à l'instant, tu gagnes combien en moyenne par contrat ? Plus que moi en un an j'imagine non ?" dis-je assez curieuse.
Il fit un geste vague de la main, en attendant que la serveuse revienne avec les cartes des menus. Parler ainsi de son travail ne le gênait pas vraiment ; il s'en foutait même. Il n'allait pas entrer dans les détails sordides, mais ça permettait de faire la conversation. Et comme il était embarqué pour la soirée avec la flic, il fallait bien qu'il meuble.
D'autant que malgré leurs prises de tête fréquentes – et la toute nouvelle attirance de Cybèle pour ses pulsions - ils s'entendaient assez bien.
« Premier critère, le travail en lui-même. Il est assez rare que je signe un papier ou quoi que ce soit, donc c'est un accord oral entre moi et le client. Je demande des détails, et en fonction, je propose une somme. Je dis que je propose, mais en réalité, j'exige : je sais ce qui est assez et ce qui ne l'est pas. Deuxième critère, l'urgence. Certains veulent un coup immédiat, dans l'instant, d'autres peuvent attendre un peu. Plus c'est urgent, et donc simple, moins je fais payer. Troisième critère, le risque en lui-même. Tabasser un mec qui le mérite c'est facile. Devoir le faire disparaître totalement, c'est compliqué. »
Nouvelle pause, grâce à la serveuse. Cette dernière semble bien plus froide qu'avant, et elle s'éloigne très vite après leur avoir donné de quoi commander à manger. Avec un petit sourire mesquin, Vasily porte de nouveau sa cigarette à ses lèvres, avant de tirer dessus et de laisser échapper la fumée.
« Sans entrer dans les détails, il y a des fois où je reçois de quoi manger pendant plusieurs mois, et d'autres fois, à peine assez pour payer mon loyer. Même ainsi, ça peut paraître exorbitant, mais je prends de gros risques dans ce que je fais. Donc, j'aime autant être bien fourni en roubles. Ça, et le fait que certaines personnes, bien que fort charmantes, coûtent chères. »
Evidemment, il fait référence aux nombreux pots-de-vin qu'il lui verse.
« Que me conseilles-tu, sinon ? Je ne vois rien sur cette carte qui paraisse véritablement bon, mais il faut profiter un peu de ce rencard. Ce n'est pas tous les jours que tu as l'occasion de sortir avec un homme, et ce n'est pas tous les jours que j'ai l'occasion de me faire plumer en offrant son repas à une femme. Mais, véritablement, je crois que le meilleur moment pour le moment, c'est cette jalousie chez la serveuse. »
Meilleur moment, oui et non. C'est ce qu'il trouve le plus agaçant, le plus chiant. Mais il va essayer d'en profiter quand même pour passer une soirée moins monotone que d'habitude. De toute façon, il avait un boulot à régler plus tard ; il passerait un peu de temps avec la flic et il partirait après, simplement. Inutile, toutefois, de lui laisser envisager qu'autre chose était possible ce soir.
Peut-être un autre soir.
Pas maintenant.
Aussi bien gaulée, et sexy, soit-elle.
Jeu 22 Aoû - 22:50
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Je pose à Vasily une question assez particulière, au sujet de son salaire. Je dois bien avouer que je suis très curieuse sur les tarifs qu'il facture à ses clients. Pour toute réponse, il hausse les épaules, en ajoutant que c'est très variable.
La serveuse revient avec les cartes des menus, j'ouvris rapidement la carte pour commencer à la feuilleter distraitement tandis que Vasily répond à ma question. Il m'explique son processus pour prendre des contrats, ce que je trouve assez intéressant. Je tique en l'entendant dire que " le fait que certaines personnes, bien que fort charmantes, coûtent chères." Je me sens visé, il est clair qu'il parle de moi.
Nous observons maintenant les menus, les différents plats, déserts et boissons. Difficile de faire un choix, dommage que les menus ne comportent pas de photos. Vasily me demande mon avis, et je commence à réfléchir plus sérieusement jusqu'à-ce qu'il prononce le mot ''rencard''. Je le regarde un peu surprise, je ne m'attendais pas à ça. Néanmoins, je ris presque en l'entendant dire qu'il allait se faire plumer en offrant un repas. Je doute qu'il dépense une somme faramineuse dans cet endroit ce n'est clairement pas un quatre-étoiles.
- "Hum... Voyons, je pense qu'une salade d'automne aux légumes et poulet, puis un stroganov devraient être pas mal, et puis, le plat est d'origine française. Et pourquoi pas une Mouravieïnik en désert." dis-je.
Vasily se gratta distraitement la barbe, moyennement convaincu par le menu. Ses yeux parcoururent rapidement tout ce qui pouvait l'intéresser, ainsi que ce que Cybèle conseillait. Il n'avait pas l'habitude de manger dans des restaurants ; plus maintenant en tout cas. Fut une époque où il l'aurait volontiers fait, mais désormais, il était forcé de manger un peu en cachette. Avaler un morceau ici et là, rapidement, toujours se préserver de gros repas trop copieux.
Il décida toutefois qu'il allait faire confiance à la jeune femme pour le moment. L'espace d'un instant, il se demanda si elle comptait quand même en profiter pour le foutre dans son lit. Qu'elle essaye, remarque, il aurait toutes les possibilités de décliner l'offre.
« Très bien, je vais prendre tout ça aussi. Je doute que vous cherchiez à m'empoisonner, vu votre tentative de flirt. »
Il lui adressa un sourire un brin moqueur, avant d'ajouter :
« Par curiosité, ça fait longtemps que vous cherchez à me draguer, ou ça vous a pris ce soir ? Si ça commence tant que ça à vous travailler, peut-être que vous auriez plus de chance avec d'autres personnes. A moins que ma brutalité et mon style particulièrement égoïste ne vous attire sournoisement ? »
La serveuse revint une nouvelle fois sur ces paroles, prit leurs commandes, puis s'éloigna. Vasily s'installa plus confortablement, croisant lui aussi les jambes... tout en prenant soin de les tenir légèrement écartées de celles de Cybèle. Il ne voulait pas lui donner de faux espoirs, car c'eut été faire preuve d'une cruauté parfaitement inutile.
Il lui arrivait, parfois, de se montrer cruel.
Vraiment, quelques fois, très peu, de temps en temps. Selon ce qu'il estimait nécessaire pour remplir sa tâche comme il le fallait, ou selon les exigences des clients, il était plus ou moins cruel. Il ne doutait pas que Cybèle s'en doutait, voir le savait, au vu de certains corps... ou plutôt de ce qu'il en restait. Il ne faisait toutefois jamais preuve de barbarie fortuite. S'il devait être brutal, cruel, c'est qu'il le fallait.
Il en tirait un certain plaisir, oui, mais jamais plus que nécessaire.
« Hmm, on dirait qu'on est bon pour une averse d'ici peu. J'espère que vous avez prévu quelque chose, car sinon, tout le monde vous matera. »
Ven 23 Aoû - 21:38
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evening coffee RPI hear a voice say : don't be so blind. It's telling me all these things that you would probably hide. Am I your one and only desire ? Am I the reason you breathe ? Or am I the reason you cry ? (Saliva → Always)
Me voilà entrain de proposer un choix de plats à Vasily. J'opte pour une salade d'automne aux légumes et poulet, un stroganov puis une Mouravieïnik en désert. Autant dire que nous allions bien manger, et surtout, êtres callés. Le plat de résistance et le désert sont plutôt épais en général.
Vasily décide de prendre la même chose que moi avant de glisser une plaisanterie à propos d'empoisonnement et de flirt. Il me sourit de façon moqueuse avec de me questionner au sujet de mon envie de flirter avec lui. Je le fais languir un peu avant de lui répondre d'un ton taquin.
- "Qui sait... Saches que les femmes aiment bien les mauvais garçons, va savoir pourquoi. Sans doute le frisson de franchir les règles." dis-je.
La serveuse revient juste après ce petit échange, et elles prit silencieusement nos commandes. Je l'observe distraitement de loin juste après ça, histoire d'être sûre qu'elle ait retenu la leçon. Alors que je suis distraite, Vasily regarde le ciel pour m'avertir d'une averse de pluie. Je regarde le ciel d'un air un peu paniqué, carrément dégoûtée de la situation.
- "Merde... J'e n'ai rien pour me protéger.. Tant pis, je prendrais la flotte, ça me tuera pas." dis-je.
La serveuse arrive quelques minutes plus tard avec les deux salades plutôt bien présentées. Des oeufs de cailles entourent le plat, tandis qu'un dôme de macédoine de légumes surmontée de lamelles de poulet occupent généreusement l'assiette. J'attrape ma fourchette pour avaler un petit oeuf.
Vasily observe un instant Cybèle, puis le ciel. Dans une autre vie, en un autre temps, il aurait aussitôt lancé quelque chose de rassurant et aurait promis qu'il l'aiderait à rentrer pour la protéger un peu de la pluie, par gentillesse. Ces réflexes étaient toujours là, il le sentait. Mais il ne pouvait pas se les permettre. Il n'en avait pas vraiment envie, en plus. C'était des dérives, des détours par rapport à sa façon d'être et à ce qu'il pouvait et voulait faire dans cette ville. Sa pénitence n'était pas achevée.
Peut-être ne le serait-elle jamais, d'ailleurs. Mais ce n'était pas ça, le problème.
« J'espère pour vous que vous ne vivez pas trop loin d'ici. La pluie n'est certes pas mortelle, mais vous risquez de finir noyée avant d'arriver. »
Il jeta un coup d'oeil distrait, mais légèrement inquiet, à la masse sombre qui se formait dans le ciel.
« A vrai dire, ça vaut pour moi aussi. Malgré mes vêtements et ma capuche, je suis bon pour une sacrée saucée ce soir. Mais j'ai malheureusement des obligations nocturnes. »
Il se contenta de plonger dans son assiette plutôt que d'en rajouter. La jeune femme, aussi curieuse pourrait-elle être, n'avait pas besoin de savoir ce qu'il avait l'intention de faire, ce qu'il devait faire, ce soir. Elle n'aimerait sans doute pas ce qu'il pourrait lui décrire, et qui plus est, ça la mettrait forcément dans une situation un peu particulière. Elle était déjà sur un fil, plus ou moins épais et plus ou moins périlleux, de manière générale. La faute à un accord avec un tueur, qui la payait grassement quand il avait besoin d'elle, et qui dînait même avec elle pour se faire un peu pardonner d'être parfois brusque et malpoli.
Et quelque part, songea Vasily en mangeant, elle pouvait s'estimer chanceuse. Car n'importe quel autre individu de son genre aurait été le pire compagnon possible pour un dîner. Et aurait été le pire partenaire possible pour l'accord qu'ils avaient depuis un bon moment.
De telles pensées amenèrent le tueur à poser alors une question qui le taraudait :
« Qu'est-ce qui vous a poussé à accepter l'accord entre nous ? Je veux dire, ce n'est pas tous les jours qu'une flic s'associe avec un tueur à gages en acceptant ses pots-de-vin. »
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